jeudi 11 juin 2020

Une escouade de «sentinelles» sur les lacs de Duhamel pour détecter le myriophylle à épi


Une escouade de «sentinelles» sur les lacs de Duhamel pour détecter le myriophylle à épi
Benoit Sabourin
le 10 juin 2020
Le Droit

Afin d’éviter de subir le même sort que plusieurs municipalités ailleurs en Outaouais et au Québec qui sont aux prises avec le myriophylle à épi, Duhamel, dans la MRC de Papineau, déploiera cet été sur l’ensemble de ses lacs des équipes de patrouilleurs bénévoles.

Ils auront pour tâche de détecter la présence de cette plante aquatique envahissante qui peut pousser jusqu’à 10 mètres de profondeur et qui détruit l’ensemble de la biodiversité partout où elle se propage.

La localité du nord de la Petite-Nation, reconnue pour son riche territoire forestier et ses nombreux plans d’eau, a fait appel à l’Organisme de bassins versants des rivières Rouge, Petite-Nation, et Saumon (OBVRPNS) et au Conseil régional de l’environnement (CRÉ) des Laurentides, qui possède une expertise dans la lutte contre le myriophylle à épi, pour mettre en place une stratégie de prévention unique afin d’éviter que cette plante indigène exotique, aussi surnommée la «plante zombie», fasse son apparition chez elle.

Selon le plus récent inventaire des plantes aquatiques réalisé par l’OBVRPNS, en 2017, on ne retrouvait aucune trace de myriophylle à épi dans les lacs de Duhamel, une situation qui pourrait bien avoir changé depuis trois ans, souligne le maire de la municipalité, David Pharand.

«Les Laurentides sont infestées de myriophylles à épi. Nos voisins immédiats, Lac-des-Plages et Montpellier, ont des lacs avec du myriophylle à épi, alors le danger nous guette parce que les pêcheurs de ce monde qui se déplacent d’un lac à l’autre pourraient facilement nous amener cette plante qu’on souhaite repousser à tout prix. L’idée, c’est de prévenir parce que quand cette espèce s’installe dans nos lacs habités, c’est une bataille à répéter chaque année. Les associations de lacs où on la retrouve investissent énormément d’argent et de ressources à tout simplement tenter de réduire le fléau, mais sans grand succès», explique M. Pharand. Le conseil municipal ce Duhamel vient justement d’adopter un nouveau règlement sur l’accès aux lacs de son territoire, lequel légifère notamment sur le lavage des embarcations avant leur mise à l’eau, une mesure qui permet d’éviter la propagation de la plante d’un plan d’eau à un autre.

Misant sur une solution sans précédent au Québec, la municipalité a récemment octroyé un contrat de 5000$ à l’OBVRPNS et au CRÉ des Laurentides afin que les deux organismes élaborent un plan d’action pour contrer l’éventuelle arrivée de l’espèce exotique envahissante à Duhamel. Cette solution a été proposée aux élus par l’Association des propriétaires du lac Gagnon, à l’automne 2019.

D’abord, une trentaine de bénévoles, des gens de la communauté locale, seront formés à distance, pandémie de COVID-19 oblige, d’ici les prochaines semaines par des spécialistes du CRÉ des Laurentides. Cette escouade de «sentinelles» patrouillera les lacs de Duhamel de la mi-juillet jusqu’au début de l’automne.

L’OBVRPNS, de son côté, a été mandaté pour identifier les équipements nécessaires pour intervenir si un plant de myriophylle est décelé. Le matériel en question sera intégré dans une trousse d’intervention dont Duhamel devra faire l’acquisition.

«Dès qu’une sentinelle détectera un myriophylle en faisant une analyse biologique du plant, on pourra immédiatement intervenir à quelques heures de délais pour empêcher que les embarcations puissent étendre la plante un peu partout dans le lac parce que dès qu’elle est fracturée, elle se répand, elle est vorace et elle remplace toutes les autres plantes», précise le maire Pharand.

Prévenir plutôt que guérir

L’aspect innovateur dans l’initiative mise sur pied à Duhamel, souligne Josianne Dion, chargée de projets à l’OBVRPNS, c’est la trousse d’intervention pour accompagner le travail des sentinelles et de la municipalité.

«On parle d’un projet où on agit en mode prévention, ce qui est vraiment rare au Québec où nous sommes généralement en mode réactif. Le CRÉ Laurentides forme des gens pour la détection du myriophylle à épi depuis déjà quelques années. Leur expertise est tellement populaire qu’ils sortent de leur propre région et ils ont accepté de venir nous aider en Outaouais», note cette dernière.
Les patrouilleurs disposeront d’outils pour effectuer leurs vérifications. En cas de découverte de l’envahisseur, ils pourront installer une balise temporaire et par la suite alerter les autorités municipales pour que le délai de réaction soit instantané.

«On travaille en ce moment sur la possibilité de fournir aux sentinelles un kit de bouées artisanales qu’ils pourraient transporter avec eux sur le terrain. Ensuite, on retrouverait dans la trousse d’intervention de la municipalité des bouées qui pourraient être installées sur le long terme. On va surtout parler pour la municipalité d’un guide de référence pour savoir comment signaler la présence de la plante aux autorités, comment installer des rideaux de turbidité, si nécessaire. C’est un outil qui a déjà été utilisé dans Laurentides pour servir de bassin de rétention en attendant que des plongeurs viennent arracher les plants. Comme c’est nouveau comme approche, toutes les options sont regardées», explique Mme Dion.

Une fois que le programme de formation et le plan d’intervention auront été complétés, Duhamel partagera l’information avec les municipalités qui souhaiteront utiliser le même modèle de prévention, assure le maire Pharand. «Si tout le monde met le même effort, ça va aider l’ensemble des lacs de notre région à éviter le pire», dit-il.


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Lettre d'invitation concernant le recrutement de sentinelles pour la gestion des risques d’introduction du myriophylle à épis!
Pour soumettre votre candidature comme sentinelle, communiquez avec le carrefour duhamellois au 819-418-7100 poste 1611 ou à carrefour@municipalite.duhamel.qc.ca, d’ici le 13 juillet 2020.


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Le commissaire au développement durable, Paul Lanoie, déplore notamment que Québec collabore de moins en moins avec les organismes chargés de protéger les lacs et rivières. 

La protection des lacs et rivières prend l’eau 
Gabriel Béland
le 10 juin 2020
La Presse

Le Québec possède 3 % des réserves en eau douce renouvelables de la planète, mais cette richesse n’est pas bien protégée par l’État, dénonce le commissaire au développement durable dans un rapport dévoilé mercredi.

« Ces ressources peuvent sembler inépuisables, ce qui rend difficile l’émergence d’une prise de conscience sur la nécessité d’en prendre soin », peut-on lire dans le rapport. 

« Manque de connaissances », « manque de cohérence », « aucune action structurante ni évaluation » … Le commissaire Paul Lanoie identifie une série de lacunes. 

Il déplore notamment que Québec collabore de moins en moins avec les organismes chargés de protéger les lacs et rivières. 

Les tables de concertation des Organismes de bassin versant sont boudées par les fonctionnaires. Le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) n’a participé qu’à 14 % de ces rencontres en 2019. Ils étaient présents à 40 % d’entre elles seulement quatre ans plus tôt. 

« La faible présence du MELCC aux rencontres des tables de concertation a été mentionnée par le regroupement des organismes de bassins versants du Québec en janvier 2016 lors d’une rencontre du comité-conjoint. Quatre ans plus tard, force est de constater que la situation a empiré », note le rapport. 

Cet absentéisme « ne démontre pas une réelle volonté d’implanter une gestion intégrée des ressources en eau », tranche-t-il. 

Québec n’a même pas un portrait clair et précis de l’état de ses 3,6 millions plans d’eau douce et milliers de rivières. L’État tarde à produire son rapport sur l’état des ressources en eau attendu en 2019. Il n’a toujours pas en mains plusieurs indicateurs importants. 

Ces lacunes pourraient fausser le portrait de notre réseau hydrique. Par exemple, la santé des lacs pourrait être pire que prévue, note le commissaire. 

« Le MELCC concluait que 76 % des 665 lacs échantillonnés présentaient peu de signes d’eutrophisation. Cependant, ce résultat reposait sur des données restreintes : le MELCC indiquait qu’il n’était basé que sur la portion la plus profonde des lacs, alors que des données sur l’état en bordure des lacs auraient pu donner un résultat différent de l’état trophique. » 

Le commissaire relève aussi dans son rapport comment les ministères tardent à adopter des orientations en matière d’écofiscalité.

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