Une vingtaine de propriétaires d’immeubles sont débarqués à l’hôtel de ville de Lac-Simon, vendredi après-midi, lors d’une séance extraordinaire du conseil municipal au cours de laquelle les certificats de signature des registres des 75 règlements d’urbanisme intégrés dans le règlement U-22-2 ont été déposés.
Pendant une période de questions qui a duré plus de 90 minutes, le ton est monté à plusieurs reprises et les critiques ont été vives à l’endroit du maire Jean-Paul Descoeurs et de ses conseillers.
À partir du 25 mars, rappelons-le, tous les Québécois pourront louer leur résidence principale pour une période de 31 jours ou moins sans qu’un règlement municipal puisse leur en interdire la possibilité, en vertu des dispositions du projet de loi provincial 67 qui entreront en vigueur. Les municipalités peuvent limiter ou interdire l’offre d’hébergement touristique de type Airbnb dans une résidence principale à certaines zones de leur territoire en modifiant leurs règlements de zonage, mais ces ajustements doivent passer par un processus référendaire.
À Lac-Simon, la signature de registre pour les 75 zones du territoire a eu lieu le 12 mars. Huit zones ont obtenu le nombre de demandes nécessaires pour passer à l’étape du référendum. Pour une quinzaine d’autres zones, il ne manquait qu’un seul vote pour que le nombre requis de signatures soit atteint pour la tenue d’un référendum. Des écarts de moins de cinq signatures ont été également enregistrés à plus d’une reprise au terme de l’exercice.
Préavis trop court?
De l’avis de plusieurs propriétaires présents à la mairie, vendredi, l’administration a intentionnellement «fait le minimum» pour communiquer les détails entourant la tenue des registres alors que l’avis public a été publié cinq jours avant l’ouverture de ceux-ci, à deux endroits dans la municipalité ainsi que sur le site Internet et la page Facebook de Lac-Simon.
Selon la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, l’avis public doit être donné au moins cinq jours avant l’ouverture d’un registre. Pour «un dossier chaud qui va diviser la population», Lac-Simon aurait dû communiquer l’information plus tôt, a clamé un citoyen qui a accusé le conseil de manquer de transparence.
Le bulletin municipal, envoyé par la poste à chaque adresse du territoire au début du mois de mars, ne contenait aucune mention sur le sujet, ont soulevé plusieurs personnes présentes.
«Quand je reçois une infolettre avec un dessin de lapin (de Pâques) en arrière et qu’on ne parle pas d’un registre qui est si important, je trouve ça aberrant. Ça n’a pas de bon sens. […] Dans votre intérieur, vous ne pensiez pas que c’était pertinent de le mettre dans l’infolettre?», a lancé aux élus Martin Dupras.
«On vous l’accorde là, votre délai, c’est vrai qu’il était court. On ne s’obstinera pas toute la journée sur ça. […] Il était court, mais il était dans les normes», a admis le maire Descoeurs, sans donner plus de détails.
Le bulletin municipal est rédigé par l’administration, a tenu à préciser la conseillère Chantal Crête. «On l’avait proposé, mais il faut comprendre que nous sommes limités. Nous sommes en manque d’employés. […] On ne peut pas aller plus vite que l’administration municipale et l’infolettre est apolitique», a souligné cette dernière.
Perte de valeur pour les propriétés
Le choix de la date pour la tenue du registre a aussi été critiqué alors que le 12 mars tombait à cheval entre la semaine de relâche scolaire en Outaouais et en Ontario. «C’était 100% calculé et voulu que ce soit comme ça», a pesté Sébastien Lemay qui dit avoir dû faire du porte à porte pour informer les résidents permanents et secondaires du village de l’existence du projet de règlement.
Peggy Jean est propriétaire d’une résidence dans la zone 40-V où une signature supplémentaire était requise pour la tenue d’un référendum. Elle accuse Lac-Simon de lui avoir causer un préjudice effectuant le processus en «catimini».
«En ce moment, c’est ma résidence secondaire, mais dans trois ans, je prévois déménager là. Dans trois ans, peut-être que ça va me tenter de m’acheter un condo en Floride et que pendant que je serai en Floride, je vais vouloir louer ma résidence principale. […] En ce moment, vous m’avez enlevé une valeur sur ma propriété et vous êtes très conscients que si nous avions eu plus de préavis […], toutes les zones auraient été en référendum», a-t-elle blâmé.
Une vérification pour valider le calcul
Les propriétaires rassemblés à l’hôtel de ville ont par ailleurs remis en question les résultats de signature du registres.
La conseillère Anik Bois, qui est opposé au règlement U-22-2, a d’ailleurs parlé d’un «vice de procédure» par rapport à la méthode de calcul du nombre de personnes habile à voter.
«J’ai trois maisons. Je n’ai pas pu signer trois fois. J’ai signé une fois. Pourtant, j’ai trois adresses dans la même zone, une à côté de l’autre. Ce n’est pas normal», a affirmé Valérie Hamelin.
Cette dernière, qui conteste trois constats d’infraction et une mise en demeure de Lac-Simon visant à lui faire cesser la location à court terme d’une maison et d’un chalet à des fins touristiques, a été déboutée devant la Cour supérieure du Québec en décembre. Mme Hamelin s’adressera à la Cour d’appel du Québec pour tenter de faire annuler le règlement de zonage de la Municipalité qui interdit la location à court terme de ses propriétés.
C’est la firme de consultants L’Atelier urbain qui a établi le calcul, a répondu le maire. Les élus et la directrice générale adjointe n’ont pas été en mesure de répondre clairement aux interrogations du public à ce sujet. M. Descoeurs a indiqué qu’un avis juridique sera demandé au début de la semaine prochaine dans le but d’éclaircir cette question. «On va s’informer et on va vous revenir», a-t-il dit.