vendredi 21 mai 2021

La facture pour les sites miniers du Québec reste salée

NON à la mine La Loutre de Lomiko !   

Environ 400 sites qui sont encore « sous responsabilité réelle et probable » de l’État québécois


La facture pour les sites miniers du Québec reste salée
Alexandre Shields
25 mai 2021

Malgré des dépenses de plus de 180 millions de dollars de fonds publics depuis 2006, la facture de la restauration des sites miniers abandonnés au Québec ne diminue pas, selon ce qui se dégage des plus récentes données officielles. Elle avoisine toujours 1,2 milliard de dollars, soit pratiquement le même montant qu’il y a 10 ans. À l’instar des gouvernements précédents, celui de François Legault promet toutefois d’agir pour venir à bout d’un des pires héritages toxiques de la province.

Au fil des décennies, des entreprises minières ont laissé derrière elles des centaines de sites miniers abandonnés, qui sont aujourd’hui à la charge de l’État québécois, un peu partout sur le territoire. Certains sites d’exploration nécessitent des travaux de nettoyage sommaires, alors que d’autres, essentiellement d’anciens sites d’exploitation, doivent faire l’objet d’importants travaux de décontamination.

Selon les données fournies au Devoir par le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles (MERN), on compte aujourd’hui un peu plus de 400 sites « sous responsabilité réelle et probable » de l’État, alors qu’on en recensait 729 en 2011. Cette baisse du nombre de sites miniers orphelins à inspecter et à restaurer est essentiellement due au fait que le gouvernement injecte, année après année, des millions de dollars pour tenter de venir à bout de ce passif environnemental.

Le plus récent bilan disponible auprès du MERN, soit celui du 31 mars 2020, fait ainsi état d’investissements publics de 178,5 millions de dollars depuis 2006 pour la restauration et le suivi des sites inscrits au « passif à titre de terrains contaminés ».

Or, malgré les dizaines de millions de dollars de fonds publics dépensés depuis 15 ans, le montant de l’évaluation du « passif » n’a pas reculé. En date du 31 mars 2020, il était estimé à 1,2 milliard de dollars, soit essentiellement le même montant estimé en 2010-2011.

Cela signifie-t-il que la facture n’a pas diminué, malgré les dépenses et les travaux de la dernière décennie ? « La valeur du passif évolue annuellement. La variation du nombre de sites miniers, la réévaluation des coûts de restauration, l’évolution de l’état de contamination ou des connaissances de cet état d’un site viennent notamment expliquer cette situation », indique le MERN, par courriel. On précise également que « la valeur du passif évolue aussi en fonction de divers facteurs économiques : les coûts de restauration, les conditions du marché immobilier, les coûts de main-d’œuvre, le marché du travail, l’évaluation municipale ».

En ce qui a trait à la facture totale estimée pour les contribuables québécois, le MERN souligne que le montant est de 1,15 milliard de dollars en 2019-2020, une somme que le ministère prend soin d’arrondir à 1,2 milliard de dollars. On affirme qu’il s’agit donc du montant « le plus bas » depuis 2010-2011, alors que la facture pour l’État était évaluée à 1,23 milliard de dollars. Concrètement, cela équivaudrait donc à un recul de 30 millions de dollars en 10 ans.

Plan à venir

Le MERN dit par ailleurs poursuivre les travaux en matière de restauration des sites miniers. « Un plan de travail pour 2021-2022 sera d’ailleurs publié ce printemps. » Le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Jonatan Julien, pense-t-il pouvoir un jour terminer la restauration de tous les sites ? Le cabinet du ministre n’a pas répondu aux demandes répétées du Devoir pour obtenir une réponse à cette question.

Il faut aussi noter que la « caractérisation » des sites miniers abandonnés n’est toujours pas achevée. Concrètement, cela signifie que la facture pourrait encore s’alourdir, une fois que le gouvernement aura terminé l’évaluation de tous les sites d’exploration et d’exploitation problématiques, au plus tard en mars 2023.

Porte-parole de la Coalition pour que le Québec ait meilleure mine, Ugo Lapointe n’est pas surpris de voir que la facture du passif minier n’a pas diminué depuis 10 ans. « Le montant de 1,2 milliard est une estimation, mais plus on évalue l’état des sites abandonnés, plus la facture augmente. Il n’est pas impossible que la facture double. »

M. Lapointe déplore depuis plusieurs années le fait que la facture soit assumée entièrement par les contribuables québécois, « alors qu’ils ne sont pas responsables du problème ». La Coalition pour que le Québec ait meilleure mine plaide pour l’imposition d’une taxe de moins de 1 % sur la « valeur brute » du minerai exploité au Québec pour payer au moins 50 % de la facture totale de la restauration des vieux sites miniers orphelins. Une idée rejetée par le gouvernement Legault.

Selon les données de l’Institut de la statistique du Québec, la valeur brute des ressources minières exploitées au Québec a atteint 10,9 milliards de dollars en 2019 et 10,7 milliards en 2018. À titre de comparaison, les « revenus miniers » du gouvernement ont atteint 279 millions de dollars en 2019-2020, soit 2,5 % de la valeur brute.

Pour éviter de répéter les erreurs du passé qui coûtent aujourd’hui très cher au trésor public, le MERN rappelle que, depuis la réforme dela Loi sur les mines, en 2013, les entreprises minières doivent déposer au gouvernement « une garantie financière correspondant à 100 % des coûts anticipés pour la restauration de l’ensemble du site ». Selon le ministère, « les sociétés minières remplissent leur obligation de garanties financières exigibles ».

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Québec veut devenir un acteur dans les minéraux stratégiques
Julien Arsenault 
30 octobre 2020

Le gouvernement Legault cible 22 minéraux critiques et stratégiques — prisés notamment par les fabricants d’appareils électroniques et de batteries — dans sa stratégie visant à faire de la province un fournisseur d’envergure dans un contexte où la demande pour ces ressources est appelée à croître rapidement.

Si les 11 objectifs présentés jeudi ratissent large, il faudra vraisemblablement s’armer de patience avant l’annonce d’une première pelletée de terre. La première étape consistera à avoir une meilleure idée de ce qui se trouve dans le sous-sol québécois par l’entremise d’une cartographie, qui devrait surtout s’effectuer dans le Nord-du-Québec ainsi que dans l’est de la province.

Les détails entourant l’enveloppe de 90 millions échelonnée sur cinq ans qui était prévue ont été dévoilés en conférence de presse par le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Jonatan Julien, accompagné de ses collègues à l’Économie, Pierre Fitzgibbon, aux Relations internationales, Nadine Girault, et à l’Environnement, Benoit Charette.

« Nous sommes en avance sur les autres provinces de cinq à six mois certainement, a estimé M. Julien. Si nous voulons participer à ce boom, on doit y être aujourd’hui. Oui, on a un certain retard sur la Chine et la Corée, mais en Amérique du Nord, on se positionne au bon moment. »

Le lithium, le graphite et le cobalt sont au cœur de la stratégie. On retrouve aussi le cuivre, le titane, le zinc, le magnésium et le niobium. Les minéraux figurant sur la liste sont prisés dans des secteurs comme les télécommunications, l’aérospatiale, le domaine médical ainsi que l’électrification des transports. À terme, bien plus de fonds publics risquent d’être injectés dans cette stratégie, puisque différents ministères, dont celui de l’Économie et de l’Innovation, disposent de jusqu’à 1 milliard pour investir dans des projets miniers, par exemple.

En forte hausse

Selon les données gouvernementales, d’ici 2050, la demande pour le cobalt, le lithium et le graphite — au cœur de la stratégie — pourrait quintupler à l’échelle mondiale. Alors que la plupart des minéraux critiques et stratégiques utilisés en Amérique du Nord proviennent de l’Asie, Québec souhaite que sa stratégie se traduise par de nouveaux projets et la construction d’infrastructures pour améliorer l’accès au territoire.

La stratégie souhaite aussi mettre l’accent sur la transformation et le recyclage. Par exemple, avec un nombre croissant de véhicules électriques sur les routes, on veut pouvoir recycler les batteries qui contiennent des minéraux. La stratégie s’ajoute déjà aux efforts déployés par le gouvernement Legault pour créer une filière des batteries électriques.

« Lorsque l’on regarde la croissance [prévue] au cours des 20 prochaines années, je pense qu’il est impératif pour les producteurs de véhicules [automobiles] que la chaîne d’approvisionnement soit le plus proche possible, a expliqué M. Fitzgibbon. Le Québec [a] un avantage concurrentiel. »

M. Fitzgibbon a également souligné qu’à l’heure actuelle, le lithium ainsi que le graphite disposaient d’une longueur d’avance en matière de projets — qui ont parfois fait face à d’importants défis. Par exemple, Nemaska Lithium s’est protégée de ses créanciers en raison d’importantes difficultés financières avant d’être reprise par Québec et un partenaire privé.

Premières Nations

Par ailleurs, des négociations sont à prévoir avec les Premières Nations puisque les endroits ciblés pour la cartographie ainsi que les projets potentiels se trouvent sur les territoires des communautés autochtones. M. Julien a précisé que des consultations avaient eu lieu dans le cadre de la stratégie, mais qu’aucune entente officielle n’avait été annoncée.

Dans l’ensemble, la stratégie gouvernementale a reçu un accueil favorable de la part de l’industrie minière ainsi que du milieu des affaires. Pour sa part, si une coalition de citoyens, d’élus municipaux, de syndicats et d’organismes environnementaux a vu d’un bon œil l’aspect entourant le recyclage, elle a déploré les commentaires du ministre de l’Environnement, qui ne semble pas vouloir revoir l’encadrement des projets miniers.

« Une mine, ce n’est pas comme ouvrir un dépanneur au coin de la rue, a lancé le co-porte-parole de la Coalition Québec meilleure mine, Ugo Lapointe, en entrevue téléphonique. On ne peut pas prétendre faire une filière de batteries pour des véhicules électriques verts si on ne fait pas une évaluation environnementale des mines qui vont l’alimenter. »

Cette coalition a notamment demandé que tous les projets miniers soient assujettis à un examen du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement. 

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Les États-Unis lancent un plan pour garantir l’approvisionnement en minéraux stratégiques
Christophe Vogt
4 juin 2019

Les États-Unis ont dévoilé mardi un plan pour garantir l’approvisionnement du pays en minéraux stratégiques et notamment en terres rares, indispensables à tous les équipements électroniques et auxquels la Chine a menacé de restreindre l’accès.

« Ces minéraux critiques sont souvent ignorés, mais sans eux la vie moderne serait impossible », a déclaré Wilbur Ross le secrétaire américain au Commerce, affirmant que le gouvernement fédéral « prend des mesures sans précédent pour s’assurer que les États-Unis ne seront pas coupés de ces matériaux vitaux ». Le plan d’action identifie 35 éléments stratégiques dont l’uranium, le titane et les terres rares, pour lesquels les États-Unis sont particulièrement dépendants de l’étranger.

Le rapport rappelle que pour 14 des 35 matériaux détaillés sur la liste, les importations représentent plus de 50 % de la consommation annuelle des États-Unis. Pour 14 des minéraux listés, « les États-Unis n’ont aucune production nationale et dépendent complètement des importations », note le rapport.

La Chine produit l’essentiel des terres rares de la planète, un ensemble de 17 métaux indispensables aux technologies de pointe et que l’on retrouve dans les téléphones intelligents, les écrans plasma, les véhicules électriques, mais aussi dans l’armement. Et Pékin s’est plu à rappeler cette dépendance — pas seulement des États-Unis — le 22 mai quand Xi Jinping est allé visiter une usine de traitement de ces métaux stratégiques. Une manière subtile de laisser planer la menace de bloquer les exportations.

Ce geste fait suite à l’intensification de la guerre commerciale menée par Donald Trump contre la Chine, mais aussi des lourdes sanctions prises contre le géant chinois des télécoms Huawei, que Washington soupçonne de favoriser l’espionnage par le régime. Une semaine plus tard, le message était encore plus clair. « Si quelqu’un veut utiliser des produits fabriqués à partir de nos exportations de terres rares pour freiner le développement de la Chine, alors je pense que [...] le peuple chinois sera mécontent », a mis en garde un responsable de la puissante agence de planification économique.

En 2010, en représailles à un différend territorial, Pékin avait brutalement interrompu ses exportations de terres rares vers le Japon mettant les entreprises de hautes technologies nippones en grandes difficultés.

Jusqu’au milieu des années 80, les États-Unis dominaient la production mondiale de terres rares, mais une catastrophe écologique dans la seule mine du pays a mené à sa fermeture en 2003, avant sa réouverture en 2011 après une flambée des prix.

Pour éviter de se retrouver dans la même situation que le Japon, l’administration Trump a bâti sa stratégie sur six plans d’action. Washington compte ainsi accélérer la recherche, le développement et le déploiement de méthodes de recyclage et de réutilisation de ces minéraux stratégiques, trouver des alternatives et aussi diversifier l’approvisionnement et améliorer les processus d’extraction, de séparation et de purification.

De fait pour certains des minéraux concernés, les États-Unis disposent bien de la matière première, mais pas du savoir-faire pour les rendre utilisables par l’industrie.Washington compte aussi renforcer la coopération et améliorer le commerce international de ces minéraux avec ses alliés.

Le plan stratégique prévoit également de faire un recensement précis des ressources naturelles disponibles dans le pays pour pouvoir les exploiter, mais il compte aussi faire la nomenclature de sources d’approvisionnement moins traditionnelles, comme l’extraction à partir de l’eau de mer ou de déchets du charbon. Et comme elle l’a fait pour d’autres industries, l’administration veut déréguler pour accélérer les choses. Le gouvernement veut enfin s’assurer qu’il disposera de la main-d’oeuvre qualifiée nécessaire pour mener à bien son projet et bâtir une base industrielle nationale solide.

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